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Nous avons remis à jour notre fichier concernant les relevés des notaires de Savines et nous avons divisé le fichier sur les notaires d'embrun en deux parties car il était trop important et se manipulait difficilement. Nous avons commencé à relever des minutes de Saint-André d'Embrun.

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Marie est la fille de Guilhem VIII et d'Eudoxie Comnène, dernière héritière de la famille des seigneurs de Montpellier. elle est née vers 1181 et décédée à Rome en 1216.

 

Sa vie est ponctuée par trois mariages qui ne semblent pas avoir été heureux. Son père, dans l'espoir que son fils issu de son second mariage puisse un jour le remplacer à la tête de la seigneurie, l'éloigne à plusieurs reprises et son dernier époux, Pierre I d'Aragon, tente lui aussi de s'en débarasser après avoir hypothéqué la fameuse seigneurie dont elle est l'héritière et l'enjeu de toutes les convoitises.

 

Si Marie ne parait pas avoir résistée à l'ambition de son père pour son demi-frère Guilhem IX, elle a lutté avec énergie pour que Montpellier revienne à son fils unique, le futur Jacques le Conquérant.

 

Sa famille :

Les Guilhem sont seigneurs de Montpellier depuis environ le milieu du Xe siècle et leur généalogie a été étudiée par plusieurs historiens de la ville de Montpellier (voir Jean Baumel [1]).

Les premiers degrés de ce lignage, qui ne sont pas rapportés dans le tableau ci-dessus, restent incertains malgré l'intérêt que leur ont porté plusieurs médiévistes imminents (C Duhamel-Amado [2]; Vidal [3]).

 

Les parents d’Eudoxie ne sont pas connus avec certitude. Nous savons seulement qu’elle est la petite nièce de Manuel Comnène, empereur de Byzance de 1143 à 1180. Son petit-fils, Jacques d’Aragon a involontairement brouillé les pistes de son ascendance en faisant d’Eudoxie une impératrice. Christian Settipani [4] propose le schéma ci contre.

 

Les annales Pisani (probablement rédigées en 1182) relate que l’empereur Manuel et Alphonse I d’Aragon arrange le mariage entre Eudoxie et Raymond Bérenger III, comte de Provence (una sua nepote…al fratello del Re di Aragona) afin de sceller une alliance politique contre l’empereur Frédéric Barberousse. Le projet ayant avorté, le seigneur de Montpellier est proposé comme une bonne alternative. Flatté d’une telle alliance avec le Basiléus, Guilhem accepte l'idée.

 

Les véritables raisons de la répudiation d’Eudoxie peuvent être d’ordre intime (Eudoxie ne lui a pas donné de fils) mais s’expliquent aussi par des raisons politiques et le désir du seigneur de Montpellier de se rapprocher du roi d’Aragon (pratique courante de l'époque). Manuel Comnène, étant mort, Guilhem n’avait plus grand-chose à espérer de la famille de sa femme. Eudoxie est enfermée à l’abbaye d’Aniane sous le contrôle de Raymond, oncle de son mari.

 

Guilhem VIII épouse alors Agnès d’Aragon, sans doute une fille d’honneur de la reine Sancha. Malheureusement pour lui, le Saint-Père n'a jamais voulu reconnaitre la légitimité des enfants de Guilhem et Agnès et sa seconde épouse est considérée par le pape comme une simple concubine.

 

Les trois mariages de Marie :

Marie de Montpellier est présentée par les historiens comme une victime de la politique matrimoniale en vigueur en ce temps là (Voir Martin Aurell [5]). Son père, déçu par Eudoxie qui ne lui donne pas d’enfant mâle, l’enferme à l’abbaye d’Aniane alors que la fillette est encore très jeune.

 

Barral de Marseille :

En 1192, à peine âgée de 12 ans, Marie est unie à Barral de Marseille, vicomte quadragénaire et procureur de Provence (Ruffi [6] p76). A cette occasion, son père, qui la dote de 100 marcs d’argent, lui aurait peut-être arraché une renonciation de ses droits sur Montpellier.

 

Barral de Marseille n’avait qu’une fille nommée Barrala de sa précédente épouse Azalais de Porcelet qu’il avait répudié quelques mois plus tôt, sans doute à cause du besoin pressent d'un héritier.

 

Au bout de quelques mois de mariage, le 13 décembre 1192, Barral décède et Marie retourne à Montpellier où elle reste 5 ans. Avant son trépas, son mari lui lègue 55 marcs que ses héritiers tardent à lui verser. Guilhem VIII s’en plaint au pape Célestin III qui oblige les ayant-droits de s’acquitter de leur dette le 17 novembre 1194 (Actes des vicomtes de Marseille [7] n° 303).

 

 

Bernard de Comminges :

En 1197, elle convole avec Bernard IV de Comminges, compagnon d’armes et conseiller du comte de Toulouse (LIM [8] n° 204) avec une dot de 200 marcs non sans lui avoir estorqué une renonciation à ses droits sur la seigneurie de Montpellier  (Histoire de la commune de Montpellier [9] p 28).

 

En premières noces, Bernard de Comminges a épousé Stéphanie, la fille du comte de Bigorre Centule III puis, après l'avoir répudiée, s'est uni avec Béatrix de Lomagne et, enfin, avec Comtors de Labarthe fille d'Arnal-Guilhem dont il s'est séparé pour cause de parenté. Marie fut donc sa quatrième femme.

 

Un témoin du mariage nommé Bertran-Gaucelm, rapporte que Bernard  n’a pas voulu embrasser la mariée au cours de la cérémonie (Vincke [10] PJ 7), ce qui en dit long sur les sentiments de ce triste personnage. En fait, d’après les historiens Charles Higounet et Laurent Macé, Marie est victime d’un complot entre Bernard de Comminges et Pierre d’Aragon. Pierre attend le décès de Guilhem VIII pour l’épouser à son tour et s’emparer de la seigneurie de Montpellier.

 

Deux filles, Mathilde et Pétronille, naissent de cette union. Au bout de trois années, Bernard, qui souhaite se débarrasser de sa nouvelle épouse, se heurte à l'hostilité des archevêques d'Auch et de Comminges qui, peut-être excédés par les débordements conjugaux de Bernard, refusent de valider le divorce. Marie est toutefois priée de reprendre le chemin de Montpellier.

 

En mars 1199, donation dotale faite par le comte Bernard IV de Comminges à Marie de Montpellier, sa femme, du château de Muret (LIM n° 206).

La présence de Marie devait gêner Guillem VIII qui négociait aprement son divorce avec Eudoxie afin de la déshériter  en faveur des enfants de son second lit. Aussi Guillem VIII exorte Bernard de reprendre Marie (Germain).

 

Le 1 decembre 1201, serment de fidélité fait par divers chevaliers à Marie de Montpellier, ainsi qu’à ses filles Mathilde et Pétronille (LIM n° 207)

 

Le 28 décembre 1201, des instructions sont données par le pape Innocent III au chapitre d’Auch concernant la répudiation de Marie de Montpellier par le comte Bernard IV de Comminges (LIM n° 38 et 39). Bernard de Comminges est contraint de rappeler Marie auprès de lui jusqu'au décès de Guillem VIII.

 

Pierre d'Aragon :

Le 15 juin 1204, avant même la dissolution de son mariage avec Bernard IV de Comminges, Marie épouse Pierre II d’Aragon. Pierre jure fidélité à Mariea promitto tibi Marie stiputauti quod nunquam te viventem dimittam, nec aliam quamlibet superinducam; et quod te a Mariam uxorem meam nutto modo decipiam juro super hec sancta Ddei quatuor evangelia… (Grand Thalamus [11] fol 1). Le prix de l’union est la seigneurie de Montpellier et, d'ailleurs, quinze jours à peine après son mariage, Pierre prêtre l'hommage féodal à l’évêque de Maguelone, suzerain de la seigneurie de Montpellier.

 

En 1205, Pierre, roi d’Aragon promet en mariage leur fille Sancie, à peine âgée de quelques mois, au fils du comte de Toulouse Raymond. Il s’engage à lui donner la ville et le château de Montpellier, le château d’Aumelas et toutes leurs dépendances. Le roi et le comte jurent de respecter leur serment, en présence, entre autres, de Bernard d’Anduze, de Bernard son fils, de Raymond de Sauve… (HGL [12] V p 89).

 

Avec cette alliance, Pierre viole ouvertement son contrat de mariage avec Marie car cet accord est négocié sans le consentement de Marie alors que Pierre cède à Sancie des biens maternels. Marie n'y consent pas de gaité de cœur et une trace de son mécontentement est parvenue jusqu'à nous. (Une charte inédite de Marie de Montpellier [13] p. 56-68).

 

En 1206, malgré la naissance d'un fils prénommé Jacques, Pierre II d’Aragon décide de changer de politique et réclame le divorce. Il prépare en secret son mariage avec Marie de Montferrat, héritière du trône de Jérusalem...

 

Photo du début du testamant de 1209. Source : Annales du Midi

 

Marie, ballotée depuis ses douze ans, réagit lorsqu’il s’agit de défendre les intérêts de son fils. En effet, la nullité de son mariage entrainerait la perte de Montpellier pour Jacques et elle ne veut pas de cette solution.

 

Elle souscrit à un premier testament en 1209 dans laquel elle stipule que son fils Jacques est son héritier universel [14]. Elle n'oublie pas ses deux filles, Mathilde et Pétronille ni ses demi-frères nés d'Inès d'Aragon. Elle substitue ses cousins Raymond-Gaucelin de Lunel puis Raymond de Roquefeuil à son fils en cas de décès.

 

Entre temps, Pierre conclut le mariage de son fils Jacques avec Aurambiaix, fille d'Elvire de Subirats, afin d'incorporer le comté d'Urgell à ses propres possessions (1209) puis, toujours à la recherche de la meilleure combinaison, fiance ce même Jacques à la fille de Simon de Montfort (1211). Jacques doit alors quitter l'entourage de sa mère pouir rejoindre celui de Simon.

 

Marie rédige un second testament le 6 octobre 1211. Elle change certains ordres de priorité et éloigne de sa succession ses demi-frères et le roi d'Aragon.

 

Les époux portent leur conflit devant le pape, chacun exposant divers éléments pour justifier leur position. Pour Pierre, ce mariage n’est pas valable car :

  • Il avait entretenu, avant son union, une liaison charnelle avec une parente de Marie ;
  • Il existait un lien matrimonial non dissous entre Bernard de Comminges et Marie.

Pour Marie, cette union avec Pierre ne possède aucun caractère d’invalidité car :

  • Bernard IV de Comminges, son second mari, avait été précédemment marié à Béatrix de Lomagne, encore en vie au moment du procès. Ce mariage n’ayant pas été dissous, Bernard ne pouvait pas prétendre à une nouvelle union ;
  • Son mariage avec Bernard est entaché de 3 degrés de consanguinité (tous les deux seraient descendants de Rainaud de Besançon (?) et d’affinité (Stéphanie de Bigorre, première femme de Bernard descendrait comme elle de Bonifacio, marquis de Montferrat).

 

Le verdict tombe le 9 janvier 1216. Marie obtient gain de cause. Le 8 avril de la même année, Innocent III déclare adultérine la liaison entre Guilhem VIII et Agnès.

 

Quelques jours plus tard, Marie dicte un troisième testament en nommant Jaume son héritier universel.

 

Bibliographie:

[1] Histoire d'une seigneurie du midi de la France. Tome 1 : naissance de Montpellier (985-1213) Jean Baumel

[2] Genèse des lignages méridionaux 2002 Claudie Duhamel-Amado

[3] Aux origines de Montpellier Bulletin historique de la ville de Montpellier n° 5 H Vidal

[4] Continuité des élites à Byzance durant les siècles obscurs 2007 C Settipani

[5] Les noces du comte ; mariage et pouvoir en Catalogne 1995 Martin Aurell

[6] Histoire de la ville de Marseille 1696 A Ruffi tome I

[7] Actes des vicomtes de Marseille 1926 H. de Gérin-Ricard et Emile Isnard

[8] Liber Instrumentorum Memorialium ou Cartulaire des Guillems de Montpellier (désormais LIM) 1881-1886 Société Archéologique de Montpellier,

[9] Histoire de la commune de Montpellier 1851 A Germain tome 1

[10 ] Der Eheprozess Peters II von Aragon (1206-1213) 1935 J Vincke Spanische Forschungen 1ière série volume V

[11] Grand Thalamus : recueil d'actes de la ville de Montpellier

[12] Histoire générale du Languedoc (désormais HGL) de Vic et Vaissette

[13] Une charte inédite de Marie de Montpellier 1860 A Germain dans Mémoires de la Société d’Archéologie de Montpellier

[14] Les testaments de Marie de Montpellier  1978 J M Lacarra et L Gonzales Anton dans Annales du Midi 1978

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